Programme de conservation de l’autruche d’Afrique du Nord au Maroc
Découvrez ci-dessous le 3e article de Sandscript #31
Au Maroc, la population à l’état sauvage de, l’autruche d’Afrique du Nord (Struthio camelus camelus) a connu un déclin très important dès le 19ème siècle, jusqu’à son entière disparition en deuxième moitié du 20ème siècle dans la région d’Oued Eddahab. Depuis les années 90, un programme de réintroduction a permis de rétablir la présence de l’autruche d’Afrique du Nord dans son aire de répartition historique marocaine. En 1996, une trentaine d’autruches vivant à l’état sauvage au Tchad ont été transférées vers le Parc National de Souss-Massa (PNSM) à Agadir, afin de permettre le développement de cette population, pour préparer ainsi les programmes de réintroduction in situ ultérieurement.
Programme de réintroduction in situ de l’autruche d’Afrique du Nord
Depuis la réintroduction dans le PNSM jusqu’à la fin des années 2000, le nombre d’autruches a augmenté jusqu’à atteindre environ 150 individus adultes, constituant la population semi-captive la plus large de la région sahélo-saharienne.
Cette population semi-captive a permis d’entamer des opérations de translocation pour la création de nouveaux groupes reproducteurs dans l’aire de répartition historique et potentielle de l’autruche. Actuellement, en plus de celle présente au PNSM, quatre populations semi-captives se situent dans le sud (provinces d’Essmara, Boujdour et Dakhla) et le sud-est (Tinghir), comptabilisant plus de 300 individus. De plus, un groupe d’une trentaine d’individus a été créé dans le sud-est (Province de Zagora) depuis 2018, afin d’entamer le programme de relâche dans la nature.
En février 2023, le Maroc a effectué la première opération de lâcher dans la nature de l’autruche d’Afrique du Nord : un groupe de 16 autruches a été relâché, comprenant 10 mâles et 6 femelles. Trois semaines après le relâché, les autruches explorent timidement leur nouvel habitat et se contentent de parcourir un rayon de 4km du site de relâcher.
Programme d’incubation artificielle
Le programme de réintroduction de l’espèce dans son aire de répartition historique est conditionné par la réussite de la saison de reproduction annuelle, qui reste liée aux différents facteurs endogènes de l’espèce, tels que le faible taux de survie des jeunes dans le milieu naturel, l’abandon des nids ou encore des facteurs liés aux aléas climatiques, notamment l’irrégularité et la rareté des pluies.
En 2019, le Maroc a mis en place un programme de conservation ex situ de l’autruche d’Afrique du Nord, basé sur un protocole d’incubation artificielle, complémentaire avec le programme de reproduction naturelle dans les réserves. Ce protocole s’inscrit dans le cadre d’un partenariat avec le Centre de Recherches Forestières, la GIZ et le Zoo Erlebnis de Hanovre, et a permis d’aboutir à de bons résultats sur trois saisons de reproduction.
Le taux d’éclosion varie entre 25 et 34%, ce qui a permis le transfert de 47 autruchons dans les différentes stations d’acclimatation. Le taux de survie est estimé à 93% durant les premières semaines d’âge jusqu’à 44% à plus de 18 mois d’âge.
Le programme de conservation en semi-captivité de l’autruche d’Afrique du Nord au Maroc, a permis de constituer des populations semi-captives importantes, le principal défi qui se présente pour l’avenir est le rétablissement de populations sauvages viables de l’autruche d’Afrique du Nord dans son aire de répartition historique.
Latifa Sikli
Vétérinaire – AGENCE NATIONALE DES EAUX ET FORÊTS – MAROC